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2390

    pape François 
     (
Audience générale du 24 mai 2017)
« La rencontre de Jésus avec ces deux disciples semble tout à fait fortuite : elle ressemble à l'un des nombreux carrefours de la vie. Ce qui se passe sur cette route est une thérapie de l'espoir. Qui le fait ? Jésus. Tout d'abord, demandez et écoutez : notre Dieu n'est pas un Dieu intrusif. Même s'il connaît déjà la raison de la déception de ces deux-là, il leur laisse le temps de plonger au plus profond de l'amertume qui les a saisis. Combien de tristesses, combien de défaites, combien d'échecs il y a dans la vie de chacun ! Combien de fois dans la vie nous avons espéré, combien de fois nous nous sommes sentis à un pas du bonheur, et puis nous nous sommes retrouvés déçus. Mais Jésus marche avec tous ces gens trompés, qui marchent la tête baissée. Et en marchant avec eux, de manière discrète, Il parvient à redonner espoir. »

2386

    Pape François 
    (Homélie lors de la Veillée Pascale (A)-  12 avril 2020) 
« Après le sabbat » (Mt 28, 1) les femmes allèrent au tombeau. C’est ainsi qu’a commencé l’Evangile de cette Veillée sainte, par le sabbat. C’est le jour du Triduum pascal que nous négligeons le plus, pris par la frémissante attente de passer de la croix du vendredi à l’alléluia du dimanche. Cette année, cependant, nous percevons plus que jamais le samedi saint, le jour du grand silence. Nous pouvons nous retrouver dans les sentiments des femmes en ce jour. Comme nous, elles avaient dans les yeux le drame de la souffrance, d’une tragédie inattendue arrivée trop vite. Elles avaient vu la mort et avaient la mort dans leur cœur. A la souffrance s’ajoutait la peur : leur arriverait-il, à elles aussi, la même fin qu’au Maître ? Et puis les craintes pour l’avenir, tout à reconstruire. La mémoire blessée, l’espérance étouffée. Pour elles c’était l’heure la plus sombre, comme pour nous. 
Mais dans cette situation les femmes ne se laissent pas paralyser. Elles ne cèdent pas aux forces obscures de la lamentation et du regret, elles ne se renferment pas dans le pessimisme, elles ne fuient pas la réalité. Le jour du sabbat, elles accomplissent quelque chose de simple et d’extraordinaire : dans leurs maisons elles préparent les parfums pour le corps de Jésus. Elles ne renoncent pas à l’amour : dans l’obscurité du cœur, elles allument la miséricorde. La Vierge, le samedi, jour qui lui sera dédié, prie et espère. Dans le défi de la douleur, elle a confiance dans le Seigneur. Ces femmes, sans le savoir, préparaient dans l’obscurité de ce sabbat « l’aube du premier jour de la semaine », le jour qui aurait changé l’histoire. Jésus, comme une semence dans la terre, allait faire germer dans le monde une vie nouvelle ; et les femmes, par la prière et l’amour, aidaient l’espérance à éclore. Combien de personnes, dans les jours tristes que nous vivons, ont fait et font comme ces femmes, semant des germes d’espérance ! Par de petits gestes d’attention, d’affection, de prière. 
A l’aube, les femmes vont au tombeau. Là l’ange leur dit : « Vous, soyez sans crainte. Il n’est pas ici, il est ressuscité » (vv.5-6). Devant une tombe, elles entendent des paroles de vie… Et ensuite elles rencontrent Jésus, l’auteur de l’espérance, qui confirme l’annonce et dit : « Soyez sans crainte » (v. 10). N’ayez pas peur, soyez sans crainte : voici l’annonce d’espérance. Elle est pour nous, aujourd’hui. Ce sont les paroles que Dieu nous répète dans la nuit que nous traversons. 
Cette nuit nous conquerrons un droit fondamental, qui ne nous sera pas enlevé : le droit à l’espérance. C’est une espérance nouvelle, vivante, qui vient de Dieu. Ce n’est pas un simple optimisme, ce n’est pas une tape sur l’épaule ou un encouragement de circonstance. Non. C’est un don du Ciel que nous ne pouvons pas nous procurer tout seuls. Tout ira bien, disons-nous avec ténacité en ces semaines, en nous agrippant à la beauté de notre humanité et en faisant monter de notre cœur des paroles d’encouragement. Mais, avec les jours qui passent et les peurs qui grandissent, même l’espérance la plus audacieuse peut s’évaporer. L’espérance de Jésus est différente. Elle met dans le cœur la certitude que Dieu sait tout tourner en bien, parce que, même de la tombe, il fait sortir la vie. 
La tombe c’est le lieu d’où celui qui rentre ne sort pas. Mais Jésus est sorti pour nous, il est ressuscité pour nous, pour apporter la vie là où il y avait la mort, pour commencer une histoire nouvelle là où on avait mis une pierre dessus. Lui, qui a renversé le rocher à l’entrée de la tombe, peut déplacer les rochers qui scellent notre cœur. Par conséquent, ne cédons pas à la résignation, ne mettons pas une pierre sur l’espérance. Nous pouvons et nous devons espérer, parce que Dieu est fidèle. Il ne nous a pas laissé seuls, il nous a visité : il est venu dans chacune de nos situations, dans la douleur, dans l’angoisse, dans la mort. Sa lumière a illuminé l’obscurité du tombeau : aujourd’hui il veut rejoindre les coins les plus obscurs de la vie. Sœur, frère, même si dans ton cœur tu as enseveli l’espérance, ne baisse pas les bras : Dieu est plus grand. L’obscurité et la mort n’ont pas le dernier mot. Courage, avec Dieu rien n’est perdu. 
Courage : c’est un mot qui dans l’Evangile sort toujours de la bouche de Jésus. Une seule fois d’autres la prononcent, pour dire à une personne dans le besoin : « Courage ! lève-toi, [Jésus] t’appelle » (Mc 10, 49). C’est lui, le Ressuscité, qui nous relève nous qui sommes dans le besoin. Si tu es faible et fragile sur le chemin, si tu tombes, ne crains pas, Dieu te tend la main et te dit : “Courage!”. Mais tu pourrais dire, comme don Abbondio : « Le courage, personne ne peut se le donner » ( I Promessi Sposi [d’Alessandro Manzoni, ndlr]- Les fiancés, XXV). Tu ne peux pas te le donner, mais tu peux le recevoir, comme un don. Il suffit d’ouvrir ton cœur dans la prière, il suffit de soulever un peu cette pierre mise à l’entrée de ton cœur pour laisser entrer la lumière de Jésus. Il suffit de l’inviter : “Viens, Jésus, dans mes peurs et dis-moi aussi : Confiance”. Avec toi, Seigneur, nous serons éprouvés mais non ébranlés. Et, quelle que soit la tristesse qui habite en nous, nous sentirons de devoir espérer, parce qu’avec toi la croix débouche sur la résurrection, parce que tu es avec nous dans l’obscurité de nos nuits : tu es certitude dans nos incertitudes, Parole dans nos silences, et rien ne pourra jamais nous voler l’amour que tu nourris pour nous. 
Voilà l’annonce pascale, une annonce d’espérance. Elle contient une deuxième partie, l’envoi. « Allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée » (Mt 28, 10), dit Jésus. « Il vous précède en Galilée » (v. 7), dit l’ange. Le Seigneur nous précède, il nous précède toujours. C’est beau de savoir qu’il marche devant nous, qu’il a visité notre vie et notre mort pour nous précéder en Galilée, c’est-à-dire dans le lieu qui pour lui et pour ses disciples rappelait la vie quotidienne, la famille, le travail. Jésus désire que nous portions l’espérance là, dans la vie de chaque jour. Mais la Galilée, pour les disciples, c’était aussi le lieu des souvenirs, surtout du premier appel. Retourner en Galilée c’est se souvenir d’avoir été aimés et appelés par Dieu. Chacun de nous a sa propre Galilée. Nous avons besoin de reprendre le chemin, nous rappelant que nous naissons et que nous renaissons d’un appel gratuit d’amour, là, dans ma Galilée. C’est le point d’où repartir toujours, surtout dans les crises, dans les temps d’épreuve. Dans le souvenir de ma Galilée. 
Mais il y a plus. La Galilée c’était la région la plus éloignée d’où ils se trouvaient, de Jérusalem. Et pas seulement géographiquement : la Galilée était le lieu le plus distant de la sacralité de la Ville sainte. C’était une région peuplée de gens divers qui pratiquaient des cultes variés : c’était la « Galilée des nations » (Mt 4, 15). Jésus envoie là-bas, il demande de repartir de là-bas. Qu’est-ce que cela nous dit ? Que l’annonce de l’espérance ne doit pas être confinée dans nos enceintes sacrées, mais doit être apportée à tous. Parce que tous ont besoin d’être encouragés et, si nous ne le faisons pas nous, qui avons touché du doigt « le Verbe de vie » (1 Jn 1, 1), qui le fera ? 
Qu’il est beau d’être des chrétiens qui consolent, qui portent les poids des autres, qui encouragent : annonciateurs de vie en temps de mort ! En chaque Galilée, en chaque région de cette humanité à laquelle nous appartenons et qui nous appartient, parce que nous sommes tous frères et sœurs, apportons le chant de la vie ! Faisons taire le cri de mort, ça suffit avec les guerres ! Que s’arrêtent la production et le commerce des armes, parce que c’est de pain et non de fusils dont nous avons besoin. Que cessent les avortements, qui tuent la vie innocente. Que s’ouvrent les cœurs de ceux qui ont, pour remplir les mains vides de qui est privé du nécessaire. 
Les femmes, à la fin, « embrassèrent les pieds » de Jésus (Mt 28, 9), ces pieds qui pour venir à notre rencontre avaient fait un long chemin, jusqu’à entrer et sortir de la tombe. Elles embrassèrent les pieds qui avaient piétiné la mort et ouvert le chemin de l’espérance. Nous, pèlerins en recherche d’espérance, aujourd’hui nous nous serrons contre toi, Jésus Ressuscité. Nous tournons le dos à la mort et nous t’ouvrons nos cœurs, toi qui es la Vie.

2385

    Pape François 
    (Urbi et Orbi - Message pour Pâques du 12 avril 2020) 
Chers frères et sœurs, bonne fête de Pâques! 
Aujourd’hui retentit dans le monde entier l’annonce de l’Eglise: “Jésus Christ est ressuscité!” – “Il est vraiment ressuscité!”.
Comme une nouvelle flamme, cette Bonne Nouvelle s’est allumée dans la nuit: la nuit d’un monde déjà aux prises avec des défis du moment et maintenant opprimé par la pandémie, qui met à dure épreuve notre grande famille humaine. En cette nuit la voix de l’Eglise a résonné : «Le Christ, mon espérance, est ressuscité!» (Séquence pascale).
C’est une autre “contagion”, qui se transmet de cœur à cœur – parce que tout cœur humain attend cette Bonne Nouvelle. C’est la contagion de l’espérance: «Le Christ, mon espérance, est ressuscité!» Il ne s’agit pas d’une formule magique, qui fait s’évanouir les problèmes. Non, la résurrection du Christ n’est pas cela. Elle est au contraire la victoire de l’amour sur la racine du mal, une victoire qui “ n’enjambe pas” la souffrance et la mort, mais les traverse en ouvrant une route dans l’abîme, transformant le mal en bien: marque exclusive de la puissance de Dieu.
Le Ressuscité est le Crucifié, pas un autre. Dans son corps glorieux il porte, indélébiles, les plaies: blessures devenues fissures d’espérance. Nous tournons notre regard vers lui pour qu’il guérisse les blessures de l’humanité accablée. 
Aujourd’hui ma pensée va surtout à tous ceux qui ont été directement touchés par le coronavirus: aux malades, à ceux qui sont morts et aux familles qui pleurent la disparition de leurs proches, auxquels parfois elles n’ont même pas pu dire un dernier au revoir. Que le Seigneur de la vie accueille avec lui dans son royaume les défunts et qu’il donne réconfort et espérance à ceux qui sont encore dans l’épreuve, spécialement aux personnes âgées et aux personnes seules. Que sa consolation ne manque pas, ni les aides nécessaires à ceux qui se trouvent dans des conditions de vulnérabilité particulière, comme ceux qui travaillent dans les maisons de santé, ou qui vivent dans les casernes et dans les prisons. Pour beaucoup, c’est une Pâques de solitude, vécue dans les deuils et les nombreuses difficultés que la pandémie provoque, des souffrances physiques aux problèmes économiques. 
Cette maladie ne nous a pas privé seulement des affections, mais aussi de la possibilité d’avoir recours en personne à la consolation qui jaillit des Sacrements, spécialement de l’Eucharistie et de la Réconciliation. Dans de nombreux pays il n’a pas été possible de s’en approcher, mais le Seigneur ne nous a pas laissés seuls! Restant unis dans la prière, nous sommes certains qu’il a mis sa main sur nous (cf. Ps 138, 5), nous répétant avec force: ne crains pas, «je suis ressuscité et je suis toujours avec toi» (cf. Missel romain)! 
Que Jésus, notre Pâque, donne force et espérance aux médecins et aux infirmiers, qui partout offrent au prochain un témoignage d’attention et d’amour jusqu’à l’extrême de leurs forces et souvent au sacrifice de leur propre santé. A eux, comme aussi à ceux qui travaillent assidûment pour garantir les services essentiels nécessaires à la cohabitation civile, aux forces de l’ordre et aux militaires qui en de nombreux pays ont contribué à alléger les difficultés et les souffrances de la population, va notre pensée affectueuse, avec notre gratitude. 
Au cours de ces semaines, la vie de millions de personnes a changé à l’improviste. Pour beaucoup, rester à la maison a été une occasion pour réfléchir, pour arrêter les rythmes frénétiques de la vie, pour être avec ses proches et jouir de leur compagnie. Pour beaucoup cependant c’est aussi un temps de préoccupation pour l’avenir qui se présente incertain, pour le travail que l’on risque de perdre et pour les autres conséquences que la crise actuelle porte avec elle. J’encourage tous ceux qui ont des responsabilités politiques à s’employer activement en faveur du bien commun des citoyens, fournissant les moyens et les instruments nécessaires pour permettre à tous de mener une vie digne et pour favoriser, quand les circonstances le permettront, la reprise des activités quotidiennes habituelles. 
Ce temps n’est pas le temps de l’indifférence, parce que tout le monde souffre et tous doivent se retrouver unis pour affronter la pandémie. Jésus ressuscité donne espérance à tous les pauvres, à tous ceux qui vivent dans les périphéries, aux réfugiés et aux sans-abri. Que ces frères et sœurs plus faibles, qui peuplent les villes et les périphéries de toutes les parties du monde, ne soient pas laissés seuls. Ne les laissons pas manquer des biens de première nécessité, plus difficiles à trouver maintenant alors que beaucoup d’activités sont arrêtées, ainsi que les médicaments et, surtout, la possibilité d’une assistance sanitaire convenable. Vu les circonstances, que soient relâchées aussi les sanctions internationales qui empêchent aux pays qui en sont l’objet de fournir un soutien convenable à leurs citoyens, et que tous les Etats se mettent en condition d’affronter les besoins majeurs du moment, en réduisant, si non carrément en remettant, la dette qui pèse sur les budgets des États les plus pauvres. 
Ce temps n’est pas le temps des égoïsmes, parce que le défi que nous affrontons nous unit tous et ne fait pas de différence entre les personnes. Parmi les nombreuses régions du monde frappées par le coronavirus, j’adresse une pensée spéciale à l’Europe. Après la deuxième guerre mondiale, ce continent a pu renaître grâce à un esprit concret de solidarité qui lui a permis de dépasser les rivalités du passé. Il est plus que jamais urgent, surtout dans les circonstances actuelles, que ces rivalités ne reprennent pas vigueur, mais que tous se reconnaissent membres d’une unique famille et se soutiennent réciproquement. Aujourd’hui, l’Union Européenne fait face au défi du moment dont dépendra, non seulement son avenir, mais celui du monde entier. Que ne se soit pas perdue l’occasion de donner une nouvelle preuve de solidarité, même en recourant à des solutions innovatrices. L’alternative est seulement l’égoïsme des intérêts particuliers et la tentation d’un retour au passé, avec le risque de mettre à dure épreuve la cohabitation pacifique et le développement des prochaines générations. 
Ce temps n’est pas le temps des divisions. Que le Christ notre paix éclaire tous ceux qui ont des responsabilités dans les conflits, pour qu’ils aient le courage d’adhérer à l’appel pour un cessez le feu mondial et immédiat dans toutes les régions du monde. Ce n’est pas le temps de continuer à fabriquer et à trafiquer des armes, dépensant des capitaux énormes qui devraient être utilisés pour soigner les personnes et sauver des vies. Que ce soit au contraire le temps de mettre finalement un terme à la longue guerre qui a ensanglanté la Syrie bien-aimée, au conflit au Yémen et aux tensions en Irak, comme aussi au Liban. Que ce temps soit le temps où Israéliens et Palestiniens reprennent le dialogue, pour trouver une solution stable et durable qui permette à tous deux de vivre en paix. Que cessent les souffrances de la population qui vit dans les régions orientales de l’Ukraine. Que soit mis fin aux attaques terroristes perpétrées contre tant de personnes innocentes en divers pays de l’Afrique. 
Ce temps n’est pas le temps de l’oubli. Que la crise que nous affrontons ne nous fasse pas oublier tant d’autres urgences qui portent avec elles les souffrances de nombreuses personnes. Que le Seigneur de la vie se montre proche des populations en Asie et en Afrique qui traversent de graves crises humanitaires, comme dans la région de Cabo Delgado, au nord du Mozambique. Qu’il réchauffe le cœur des nombreuses personnes réfugiées et déplacées, à cause de guerres, de sécheresse et de famine. Qu’il donne protection aux nombreux migrants et réfugiés, beaucoup d’entre eux sont des enfants, qui vivent dans des conditions insupportables, spécialement en Libye et aux frontières entre la Grèce et la Turquie. Et je ne veux pas oublier l’île de Lesbos. Qu’il permette au Venezuela d’arriver à des solutions concrètes et immédiates pour accorder l’aide internationale à la population qui souffre à cause de la grave conjoncture politique, socio-économique et sanitaire. 
Chers frères et sœurs,
indifférence, égoïsme, division, oubli ne sont pas vraiment les paroles que nous voulons entendre en ce temps. Nous voulons les bannir en tout temps! Elles semblent prévaloir quand la peur et la mort sont victorieuses en nous, c’est-à-dire lorsque nous ne laissons pas le Seigneur Jésus vaincre dans notre cœur et dans notre vie. Lui, qui a déjà détruit la mort nous ouvrant le chemin du salut éternel, qu’il disperse les ténèbres de notre pauvre humanité et nous introduise dans son jour glorieux qui ne connaît pas de déclin.
Par ces réflexions, je voudrais souhaiter à vous tous une bonne fête de Pâques.

2384

    Pape François 
    (Homélie du 13 avril 2020 - Lundi dans l'Octave de Pâques - A- 
le Pape François a commenté l’Évangile de ce jour (Mt 28, 8-15)
" L’Évangile d’aujourd’hui nous présente un choix, un choix de tous les jours, un choix humain mais qui tient depuis ce jour-là, entre la joie, l’espérance de la résurrection de Jésus et la nostalgie du tombeau.

Les femmes vont de l’avant pour apporter la Bonne Nouvelle -Dieu commence toujours avec les femmes, elles ouvrent la route. Elles ne doutent pas, elles savent, elles l’ont vu, elles l’ont touché. Elles ont vu le tombeau vide. C’est vrai que les disciples ne pouvaient pas le croire. Ils se disaient que ces femmes avaient peut-être trop de fantaisie… Je ne sais pas… Ils avaient des doutes, mais pas elles, elles étaient sûres et elles sont allées de l’avant jusqu’à aujourd’hui pour dire que Jésus est ressuscité, qu'il est vivant parmi nous. Puis, il y a une autre option : c’est mieux de ne pas vivre avec un tombeau vide. Ce tombeau vide créera beaucoup de problèmes. Il y a la décision de cacher les faits. Et comme toujours : quand on ne sert pas Dieu, le Seigneur, nous servons l’autre dieu, l’argent.

Rappelons ce que Jésus a dit, il y a deux seigneurs, le Seigneur Dieu et le maître argent. On ne peut les servir tous les deux. Pour sortir de cette évidence, de cette réalité, les prêtres et les docteurs de la loi ont choisi l’autre route, celle qu’offrait leur dieu : l’argent, et ils ont payé le silence des témoins. Un des gardes avait confessé, à peine Jésus était-il mort, «vraiment, celui-ci était le fils de Dieu !». Ces pauvres gardes ne comprennent pas, ils ont peur parce qu’il en va de leur vie. Ils sont allés voir les docteurs de la loi et ces derniers les ont payés, ils ont acheté leur silence. Et cela est pure corruption.

Si tu ne confesses pas que Jésus Christ est le Seigneur, demande-toi pourquoi, (demande-toi) où est le sceau de ton tombeau, où est la corruption. Il est vrai que beaucoup de gens ne confessent pas Jésus parce qu’ils ne le connaissent pas, qu’on ne leur a pas annoncé avec cohérence, c’est notre faute. Mais quand, devant les évidences, on prend un autre chemin, c’est le chemin du diable, la route de la corruption. On paie, toi, sois silencieux.

Aujourd’hui encore, devant la fin qu’on espère prochaine de cette pandémie, nous avons deux options : est-ce que notre pari sera la vie, la résurrection des peuples ou ce sera le dieu argent : retourner au tombeau de la faim, de l’esclavage, des guerres, de la fabrication d’armes, des enfants sans éducation... Là est le tombeau.

Que le Seigneur, dans notre vie personnelle ou sociale, nous aide toujours à choisir l’annonce : l’annonce qui est un horizon ouvert, toujours, qui nous pousse à choisir le bien des gens et à ne jamais tomber dans le tombeau du dieu argent."

2351

    pape François
    (Audience Générale du 8 avril 2020 - Mercredi Saint)
« Vivre ces jours avec le Crucifix et l’Évangile » Et « découvrir le vrai visage de Dieu » 
Chers frères et sœurs, bonjour ! 
En ces semaines d’appréhension en raison de la pandémie qui fait tant souffrir le monde, parmi toutes les questions que nous nous posons, il peut y en avoir également sur Dieu : Que fait-il face à notre souffrance ? Où est-il lorsque tout va de travers ? Pourquoi ne résout-il pas les problèmes en urgence ? Ce sont des questions que nous nous posons sur Dieu.
Le récit de la Passion de Jésus qui nous accompagne en ces jours saints nous aide. Là aussi, en effet, de nombreuses interrogations se bousculent. Après avoir triomphalement accueilli Jésus à Jérusalem, les gens se demandaient s’il allait finalement libérer le peuple de ses ennemis (cf. Lc 24,21). Ils attendaient un Messie puissant, triomphant, avec une épée. Au contraire, celui qui arrive est doux et humble de cœur, il appelle à la conversion et à la miséricorde. Et c’est précisément la foule, qui l’avait d’abord acclamé, qui crie : « Qu’il soit crucifié ! » (Mt 27,23). Troublés et effrayés, ceux qui le suivaient l’abandonnèrent. Ils pensaient : si le sort de Jésus est celui-ci, il n’est pas le Messie, parce que Dieu est fort, Dieu est invincible.
Mais si nous poursuivons notre lecture du récit de la Passion, nous trouvons un fait surprenant. Quand Jésus meurt, le centurion romain qui n’était pas croyant, qui n’était pas juif mais qui était un païen, qui l’avait vu souffrir sur la Croix et l’avait entendu pardonner à tous, qui avait touché du doigt son amour sans mesure, confesse : « Vraiment, cet homme était Fils de Dieu » (Mc 15,39). Il dit exactement le contraire des autres. Il dit que Dieu est là, que c’est vraiment Dieu.
Nous pouvons nous demander aujourd’hui : quel est le vrai visage de Dieu ? D’habitude, nous projetons sur lui ce que nous sommes, à la puissance maximale : notre succès, notre sens de la justice, et même notre indignation. Mais l’Évangile nous dit que Dieu n’est pas comme cela. Il est différent et nous ne pouvons par le connaître par nos propres forces. C’est pour cela qu’il s’est fait proche, qu’il est venu à notre rencontre et que, justement à Pâques, il s’est révélé totalement. Et où s’est-il totalement révélé ? Sur la Croix. C’est là que nous apprenons les traits du visage de Dieu. N’oublions pas, frères et soeurs, que la Croix est la chaire de Dieu. Cela nous fera du bien de regarder le Crucifix en silence et de voir qui est notre Seigneur : il est Celui qui ne montre pas quelqu’un du doigt, ni non plus ceux qui le crucifient, mais qui ouvre grand les bras à tous ; qui ne nous écrase pas de sa gloire, mais qui se laisse dépouiller pour nous ; qui ne nous aime pas en mots, mais qui nous donne la vie en silence ; qui ne nous contraint pas, mais qui nous libère ; qui ne nous traite pas comme des étrangers, mais qui prend sur lui notre mal, qui prend sur lui nos péchés. Et cela pour nous libérer de nos préjugés sur Dieu, regardons le Crucifix. Et puis ouvrons l’Évangile. En ces jours, tous en quarantaine à la maison, enfermés, prenons ces deux choses en main : le Crucifix, regardons-le ; et ouvrons l’Évangile. Cela sera pour nous – disons-le ainsi – comme une grande liturgie domestique, parce qu’en ces jours-ci nous ne pouvons pas aller à l’église. Le Crucifix et l’Évangile !
Nous lisons dans l’Évangile que, lorsque les gens vont chercher Jésus pour le faire roi, par exemple après la multiplication des pains, il part (cf. Jn 6,15). Et quand les diables veulent révéler sa majesté divine, il les fait taire (cf Mc 1,24-25). Pourquoi ? Parce que Jésus ne veut pas qu’on se méprenne sur lui, il ne veut pas que les gens confondent le vrai Dieu, qui est amour humble, avec un faux dieu, un dieu mondain qui se donne en spectacle et s’impose par la force. Il n’est pas une idole. Il est Dieu qui s’est fait homme, comme chacun de nous, et il s’exprime en tant qu’homme, mais avec la force de sa divinité. En revanche, dans l’Évangile, quand l’identité de Jésus est-elle solennellement proclamée ? Quand le centurion dit : « Vraiment, c’était le le Fils de Dieu ». C’est là que c’est affirmé, dès qu’il a donné sa vie sur la Croix, parce qu’on ne peut plus se tromper : on voit que Dieu est tout-puissant dans l’amour, et pas autrement. C’est sa nature, parce qu’il est ainsi fait. Il est l’Amour.
Tu pourrais objecter : « À quoi me sert un dieu aussi faible, qui meurt ? Je préférerais un dieu fort, un dieu puissant ! ». Mais tu sais, le pouvoir de ce monde passe, alors que l’amour demeure. Seul l’amour garde la vie que nous avons, parce qu’il embrasse nos fragilités et les transforme. C’est l’amour de Dieu qui a guéri, à Pâques, notre péché par son pardon, qui a fait de la mort un passage de vie, qui a changé notre peur en confiance, notre angoisse en espérance. Pâques nous dit que Dieu peut tout transformer en bien. Qu’avec lui, nous pouvons vraiment croire que tout ira bien. Et cela n’est pas une illusion, parce que la mort et la résurrection de Jésus ne sont pas une illusion : cela a été une vérité ! Voilà pourquoi, le matin de Pâques, nous entendons : « N’ayez pas peur » (cf. Mt 28,5). Et les questions angoissantes sur le mal ne disparaissent pas d’un coup, mais elles trouvent dans le Ressuscité le fondement solide qui nous permet de ne pas faire naufrage.
Chers frères et sœurs, Jésus a changé l’histoire en se faisant proche de nous et, même si elle est encore marquée par le mal, il en a fait une histoire de salut. En offrant sa vie sur la Croix, Jésus a aussi vaincu la mort. Du cœur ouvert du Crucifié, l’amour de Dieu rejoint chacun de nous. Nous pouvons changer nos histoires en nous approchant de lui, en accueillant le salut qu’il nous offre. Frères et sœurs, ouvrons-lui tout notre cœur dans la prière, cette semaine, ces jours-ci : avec le Crucifix et avec l’Évangile. N’oubliez pas : le Crucifix et l’Évangile. La liturgie domestique sera celle-là. Ouvrons-lui notre cœur tout entier dans la prière, laissons son regard se poser sur nous. Et nous comprendrons que nous ne sommes pas seuls, mais aimés, parce que le Seigneur ne nous abandonne pas et ne nous oublie pas, jamais. Et c’est avec ces pensées que je vous souhaite une Sainte Semaine et une Sainte fête de Pâques.

2346

    Pape François 
    (Méditation du pape à l'occasion de "sa prise de possession" de Sainte Marie Majeure, le 4 mais 2013)
Chers frères et sœurs,
Ce soir nous sommes ici devant Marie. Nous avons prié sous sa conduite maternelle, afin qu’elle nous aide à être toujours plus unis à son Fils Jésus ; nous lui avons apporté nos joies et nos souffrances, nos espérances et nos difficultés ; nous l’avons invoquée avec le beau titre de “Salus Populi Romani” en demandant pour nous tous, pour Rome, pour le monde, qu’elle nous donne la santé. Oui, car Marie nous donne la santé, elle est notre santé.
Jésus Christ, par sa passion, mort et résurrection, nous apporte le salut, nous donne la grâce et la joie d’être enfants de Dieu, de l’appeler en vérité par le nom de Père. Marie est mère, et une mère se préoccupe surtout de la santé de ses enfants, elle sait toujours prendre soin d’eux, avec un grand et tendre amour. La Vierge protège notre santé. Qu’est-ce que cela signifie ? Je pense en particulier à trois aspects : elle nous aide à grandir, à affronter la vie, à être libres. Elle nous aide à grandir, elle nous aide à affronter la vie, et elle nous aide à être libres.
Une maman aide ses enfants à grandir et veut qu’ils grandissent bien ; pour cela, elle les éduque à ne pas céder à la paresse – qui dérive aussi d’un certain bien-être -, à ne pas s’installer dans une vie facile, où l’on se contente de posséder des choses. La maman prend soin des enfants afin qu’ils grandissent toujours plus, qu’ils se fortifient, qu’ils soient capables de prendre des responsabilités, de s’engager dans la vie, de tendre vers de grands idéaux. L’Evangile de saint Luc dit que, dans la famille de Nazareth, Jésus « grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui. » (Lc 2,40). La Vierge fait justement ceci avec nous, elle nous aide à grandir humainement et dans la foi, à être solides et à ne pas céder à la tentation d’être hommes et chrétiens de façon superficielle, mais à vivre de façon responsable, à tendre toujours plus vers le haut.
Une maman pense aussi à la santé des enfants en les éduquant à affronter les difficultés de la vie. On n’éduque pas, on ne prend pas soin de la santé en évitant les problèmes, comme si la vie était une autoroute sans obstacles. La maman aide les enfants à regarder avec réalisme les problèmes de la vie et à ne pas se perdre en eux, mais à les affronter avec courage, à ne pas être faibles, et à savoir les dépasser. Une mère « sent » l’équilibre sain entre la sécurité et les zones de risque. Une maman sait faire cela. On ne peut pas toujours être sur la route de la sécurité, sinon on ne peut pas grandir. Mais on ne peut pas non plus être toujours sur la route du risque… une maman sait orienter. Une vie sans défis n’existe pas et un jeune homme ou une jeune fille qui ne sait pas y faire face en risquant le jeu, n’a pas de colonne vertébrale ! Rappelons-nous la parabole du bon samaritain : Jésus ne propose pas l’attitude du prêtre et du lévite, qui évitent de secourir celui qui était tombé sur des brigands, mais l’attitude du samaritain, qui voit la situation de cet homme et y fait face de façon concrète.
Dans sa vie, Marie a vécu de nombreux moments pas faciles, de la naissance de Jésus, quand « il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune » (Lc 2,7), jusqu’au Calvaire : (cf. Jn 19,25). Et comme une bonne mère elle nous est proche, afin que nous ne perdions jamais le courage face aux adversités de la vie, face à notre faiblesse, face à nos péchés : elle nous donne la force, nous indique le chemin de son Fils. Jésus, de la croix, dit à Marie, en montrant Jean : « Femme, voici ton fils ! » et à Jean : « Voici ta mère ! » (cf. Jn 19,26-27). En ce disciple nous sommes tous représentés : le Seigneur nous confie dans les mains pleines d’amour et de tendresse de sa Mère, pour que nous sentions son soutien pour affronter et vaincre les difficultés de notre chemin humain et chrétien. N’ayez pas peur des difficultés ! Affrontez-les avec l’aide de la « Maman ».
Un dernier aspect : une bonne maman ne se contente pas d’accompagner ses enfants dans leur croissance, sans éviter les problèmes, les défis de la vie ; une bonne maman aide aussi à prendre des décisions définitives, dans la liberté. Ce n’est pas facile ; mais une maman sait le faire. Mais que signifie liberté ? Ce n’est certainement pas faire tout ce que l’on veut, en se laissant dominer par les passions, ni passer d’une expérience à l’autre sans discernement, ni suivre les modes actuelles ; la liberté ne signifie pas « jeter tout ce qui ne nous plaît pas par la fenêtre ». La liberté nous est donnée afin que nous sachions faire les bons choix dans la vie ! Marie, en bonne mère, nous éduque à être comme Elle, capables de faire des choix définitifs, avec cette pleine liberté, par laquelle elle a répondu “oui” au plan de Dieu dans sa vie (cf. Lc 1,38).
Chers frères et soeurs, il est difficile, aujourd’hui, de prendre des décisions définitives ! Le provisoire nous séduit. Nous sommes victimes d’une tendance qui nous pousse au provisoire… comme si nous désirions rester adolescents toute la vie ! N’ayons pas peur des engagements définitifs, des engagements qui impliquent et concernent toute la vie ! De cette façon notre vie sera féconde !
Toute l’existence de Marie est un hymne à la vie, un hymne d’amour à la vie : elle a enfanté Jésus dans la chair et a accompagné la naissance de l’Eglise sur le Calvaire et au Cénacle. La « Salus Populi Romani » est la maman qui nous donne la santé pour grandir, pour affronter et dépasser les problèmes, pour nous rendre libres en vue des choix définitifs ; la maman qui nous enseigne à être féconds, à être ouvert à la vie et à être toujours féconds de bien, féconds de joie, féconds d’espérance, à ne jamais perdre l’espérance, à partager la vie avec les autres, la vie physique et spirituelle.
Nous te le demandons ce soir, O Marie, Salus Populi Romani, pour le peuple de Rome, pour nous tous : donne-nous la santé que toi seule peut donner, pour que nous soyons toujours signes et instruments de vie.

2303

    pape François 
    (Homélie du 28 mars, en la chapelle de la maison Sainte Marthe retransmise en direct -
     Jn 7, 40-53)
 au début de la Messe : «Ces derniers jours, dans certaines régions du monde, les conséquences - certaines conséquences - de la pandémie sont devenues apparentes ; l'une d'entre elles est la faim. Les gens commencent à voir des gens qui ont faim, parce qu'ils ne peuvent pas travailler, parce qu'ils n'ont pas d'emploi stable, et pour tant d’autres raisons. Nous commençons déjà à voir le "plus tard", qui viendra plus tard mais commence maintenant. Prions pour les familles qui commencent à être dans le besoin à cause de la pandémie».
Homélie : 
« "Puis ils s’en allèrent chacun chez soi": après la discussion, chacun retourna à ses convictions. Il y a une brèche dans le peuple: les gens qui suivent Jésus et l'écoutent - ils ne réalisent pas combien de temps ils passent à l'écouter, parce que la Parole de Jésus entre dans leur cœur - et le groupe des docteurs de la Loi, qui a priori rejettent Jésus parce qu'ils n’agit pas selon la loi, selon eux. Il s'agit de deux groupes de personnes. Le peuple qui aime Jésus, le suit ainsi que le groupe des intellectuels de la Loi, les dirigeants d'Israël, les dirigeants du peuple. C'est clair : "Les gardes revinrent auprès des grands prêtres et des pharisiens, qui leur demandèrent: «Pourquoi ne l’avez-vous pas amené ?» Les gardes répondirent: «Jamais un homme n’a parlé de la sorte !» Les pharisiens leur répliquèrent: «Alors, vous aussi, vous vous êtes laissé égarer? Parmi les chefs du peuple et les pharisiens, y en a-t-il un seul qui ait cru en lui? Quant à cette foule qui ne sait rien de la Loi, ce sont des maudits !»". Ce groupe de docteurs de la loi, l'élite, éprouve du mépris pour Jésus. Mais ils ont aussi du mépris pour les gens, "ces gens", qui sont ignorants, qui ne savent rien. Le peuple de Dieu saint fidèle croit en Jésus, le suit, et ce petit groupe d'élites, les Docteurs de la Loi, se détache du peuple et ne reçoit pas Jésus. Mais comment ça se fait, s’ils étaient illustres, intelligents, et qu’ils avaient étudié? Mais ils avaient un grand défaut: ils avaient perdu le souvenir de leur appartenance à un peuple. 
Le peuple de Dieu suit Jésus ... il ne peut pas expliquer pourquoi, mais il le suit et cela leur va au cœur, et il ne se fatigue pas. Pensons au jour de la multiplication des pains: ils ont passé toute la journée avec Jésus, au point que les apôtres lui disent: «Renvoie-les, pour qu'ils s'en aillent s'acheter de quoi manger». Les apôtres ont également pris leurs distances, ils n'ont pas considéré, ils n'ont pas méprisé mais ils n'ont pas considéré le peuple de Dieu. «Qu’ils aillent manger». La réponse de Jésus: «Donnez-leur vous-mêmes à manger». Il les remet parmi le peuple. 
Ce fossé entre l'élite des chefs religieux et le peuple est une tragédie qui vient de loin. Pensons, dans l'Ancien Testament, à l'attitude des fils d'Eli dans le temple: ils se servaient du peuple de Dieu; et si certains d'entre eux, un peu athées, venaient accomplir la Loi, ils disaient: "Ils sont superstitieux". Mépris pour le peuple. Le mépris des gens "qui ne sont pas éduqués comme nous qui avons étudié, qui savons...". Mais au contraire, le peuple de Dieu a une grande grâce: son flair. Le flair de savoir où se trouve l'Esprit. Il est pécheur, comme nous: il est pécheur. Mais il a ce flair pour connaître les chemins du salut. 
Le problème des élites, des clercs d'élite comme ceux-ci, c'est qu'ils ont perdu la mémoire de leur appartenance au Peuple de Dieu; ils sont devenus sophistiqués, ils sont passés à une autre classe sociale, ils se sont sentis comme des dirigeants. C'est le cléricalisme qui était déjà là. "Mais comment se fait-il – ai-je entendu dire ces jours-ci - que ces religieuses, ces prêtres qui sont en bonne santé aillent nourrir les pauvres, ils peuvent attraper le coronavirus ? Mais dites à la mère supérieure qu'elle ne laisse pas sortir les religieuses, dites à l'évêque qu'il ne laisse pas sortir les prêtres ! Ils sont faits pour les sacrements! Mais pour donner à manger, c’est au gouvernement de pourvoir". C'est ce dont on parle ces jours-ci: le même argument. "Ce sont des gens de seconde classe: nous nous sommes la classe dirigeante, nous ne devons pas nous salir les mains avec les pauvres". 
Je me dis souvent: ce sont des gens bien - des prêtres, des religieuses - qui n'ont pas le courage d'aller servir les pauvres. Il manque quelque chose. C’est ce qui manquait à ces personnes, aux docteurs de la loi. Ils ont perdu la mémoire, ils ont perdu ce que Jésus ressentait dans son cœur: qu'il faisait partie de son peuple. Ils ont perdu le souvenir de ce que Dieu a dit à David: "Je t'ai pris du troupeau". Ils ont perdu la mémoire de leur propre appartenance au troupeau. 
Et ceux-ci, chacun, est rentré chez lui. Un fossé. Nicodème, qui a vu quelque chose - c'était un homme inquiet, peut-être pas si courageux, trop diplomatique, mais inquiet - est allé voir Jésus ensuite, mais il a été fidèle dans ce qu'il pouvait; il a essayé de faire une médiation et a pris la Loi: "Notre Loi permet-elle de juger un homme sans l’entendre d’abord pour savoir ce qu’il a fait ?" Ils lui répondirent, mais ils ne répondirent pas à sa question sur la Loi: "Serais- tu, toi aussi, de Galilée? Etudie. Tu es un ignorant, et tu verras que jamais aucun prophète ne surgit de Galilée !". Et l’histoire s’est terminée comme ça. 
Pensons aussi aujourd'hui à tant d'hommes et de femmes qualifiés au service de Dieu qui sont bons et vont servir le peuple; tant de prêtres qui ne se détachent pas du peuple. Avant-hier, j'ai reçu une photo d'un prêtre, un prêtre de montagne, de nombreux petits villages, dans un endroit où il neige, et dans la neige, il a porté l'ostensoir dans les petits villages pour donner la bénédiction. Il ne se souciait pas de la neige, il ne se souciait pas de la brûlure que le froid lui faisait sentir dans ses mains en contact avec le métal de l'ostensoir: il ne se souciait que d'apporter Jésus au peuple. 
Pensons, chacun de nous, de quelle partie nous sommes, si nous sommes au milieu, un peu indécis, si nous avons l’ouïe du peuple de Dieu, du peuple fidèle de Dieu qui ne peut pas échouer: il a cette infallibilitas in credendo. Et pensons à l'élite qui se détache du peuple de Dieu, à ce cléricalisme. Et peut-être que le conseil que Paul donne à son disciple, le jeune évêque Timothée, nous fera du bien à tous: "Souviens-toi de ta mère et de ta grand-mère". Souviens-toi de ta mère et de ta grand-mère. Si Paul a donné ce conseil, c’est parce qu’il savait bien à quel danger portait ce sentiment d’élite de notre classe dirigeante.» 
Le Pape François a conclu cette messe par un temps d’adoration et la bénédiction eucharistique, en invitant les fidèles à faire la communion spirituelle. Voici la prière récitée par le Pape : 
«Mon Jésus, je t’adore dans le Saint-Sacrement de ton amour, désireux de te recevoir dans la pauvre demeure que t’offre mon cœur. En attente du bonheur de la communion sacramentelle, je veux te posséder en esprit. Viens à moi, Ô mon Jésus, pour que je vienne à Toi. Que ton amour enflamme tout mon être, pour la vie et pour la mort. Je crois en toi, j’espère en toi, je t’aime. Ainsi soit-il.»

2283

    Pape François 
     (Bénédiction Urbi et Orbi du 27 mars 2020)
Méditation du pape François   
«Le soir venu» (Mc 4, 35). Ainsi commence l’Evangile que nous avons écouté. Depuis des semaines, la nuit semble tomber. D’épaisses ténèbres couvrent nos places, nos routes et nos villes; elles se sont emparées de nos vies en remplissant tout d’un silence assourdissant et d’un vide désolant, qui paralyse tout sur son passage: cela se sent dans l’air, cela se ressent dans les gestes, les regards le disent. Nous nous retrouvons apeurés et perdus. Comme les disciples de l’Evangile, nous avons été pris au dépourvu par une tempête inattendue et furieuse. Nous rendons compte que nous nous trouvons dans la même barque, tous fragiles et désorientés, mais en même temps tous importants et nécessaires, tous appelés à ramer ensemble, tous ayant besoin de nous réconforter mutuellement. Dans cette barque… nous trouvons tous. Comme ces disciples qui parlent d’une seule voix et dans l’angoisse disent: «Nous sommes perdus» (v. 38), nous aussi, nous nous apercevons que nous ne pouvons pas aller de l’avant chacun tout seul, mais seulement ensemble. 
Il est facile de nous retrouver dans ce récit. Ce qui est difficile, c’est de comprendre le comportement de Jésus. Alors que les disciples sont naturellement inquiets et désespérés, il est à l’arrière, à l’endroit de la barque qui coulera en premier. Et que fait-il? Malgré tout le bruit, il dort serein, confiant dans le Père – c’est la seule fois où, dans l’Evangile, nous voyons Jésus dormir –. Puis, quand il est réveillé, après avoir calmé le vent et les eaux, il s’adresse aux disciples sur un ton de reproche: «Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?» (v. 40). 
Cherchons à comprendre. En quoi consiste le manque de foi de la part des disciples, qui s’oppose à la confiance de Jésus? Ils n’avaient pas cessé de croire en lui. En effet, ils l’invoquent. Mais voyons comment ils l’invoquent: «Maître, nous sommes perdus; cela ne te fait rien?» (v. 38). Cela ne te fait rien: ils pensent que Jésus se désintéresse d’eux, qu’il ne se soucie pas d’eux. Entre nous, dans nos familles, l’une des choses qui fait le plus mal, c’est quand nous nous entendons dire: “Tu ne te soucies pas de moi?”. C’est une phrase qui blesse et déclenche des tempêtes dans le cœur. Cela aura aussi touché Jésus, car lui, plus que personne, tient à nous. En effet, une fois invoqué, il sauve ses disciples découragés. 
La tempête démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos projets, nos habitudes et priorités. Elle nous démontre comment nous avons laissé endormi et abandonné ce qui alimente, soutient et donne force à notre vie ainsi qu’à notre communauté. La tempête révèle toutes les intentions d’“emballer” et d’oublier ce qui a nourri l’âme de nos peuples, toutes ces tentatives d’anesthésier avec des habitudes apparemment “salvatrices”, incapables de faire appel à nos racines et d’évoquer la mémoire de nos anciens, en nous privant ainsi de l’immunité nécessaire pour affronter l’adversité. 
Crucifix de l'église san Marcello
 À la faveur de la tempête, est tombé le maquillage des stéréotypes avec lequel nous cachions nos “ego” toujours préoccupés de leur image ; et reste manifeste, encore une fois, cette appartenance commune (bénie), à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire: le fait d’être frères.
«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?». Seigneur, ce soir, ta Parole nous touche et nous concerne tous. Dans notre monde, que tu aimes plus que nous, nous sommes allés de l’avant à toute vitesse, en nous sentant forts et capables dans tous les domaines. Avides de gains, nous nous sommes laissé absorber par les choses et étourdir par la hâte. Nous ne nous sommes pas arrêtés face à tes rappels, nous ne nous sommes pas réveillés face à des guerres et à des injustices planétaires, nous n’avons pas écouté le cri des pauvres et de notre planète gravement malade. Nous avons continué notre route, imperturbables, en pensant rester toujours sains dans un monde malade. Maintenant, alors que nous sommes dans une mer agitée, nous t’implorons: “Réveille-toi Seigneur!”. 
«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?». Seigneur, tu nous adresses un appel, un appel à la foi qui ne consiste pas tant à croire que tu existes, mais à aller vers toi et à se fier à toi. Durant ce Carême, ton appel urgent résonne : “Convertissez-vous”, «Revenez à moi de tout votre cœur» (Jl 2, 12). Tu nous invites à saisir ce temps d’épreuve comme un temps de choix. Ce n’est pas le temps de ton jugement, mais celui de notre jugement: le temps de choisir ce qui importe et ce qui passe, de séparer ce qui est nécessaire de ce qui ne l’est pas. C’est le temps de réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres. Et nous pouvons voir de nombreux compagnons de voyage exemplaires qui, dans cette peur, ont réagi en donnant leur vie. C’est la force agissante de l’Esprit déversée et transformée en courageux et généreux dévouements. C’est la vie de l’Esprit capable de racheter, de valoriser et de montrer comment nos vies sont tissées et soutenues par des personnes ordinaires, souvent oubliées, qui ne font pas la une des journaux et des revues ni n’apparaissent dans les grands défilés du dernier show mais qui, sans aucun doute, sont en train d’écrire aujourd’hui les évènements décisifs de notre histoire: médecins, infirmiers et infirmières, employés de supermarchés, agents d’entretien, fournisseurs de soin à domicile, transporteurs, forces de l’ordre, volontaires, prêtres, religieuses et tant et tant d’autres qui ont compris que personne ne se sauve tout seul. Face à la souffrance, où se mesure le vrai développement de nos peuples, nous découvrons et nous expérimentons la prière sacerdotale de Jésus: «Que tous soient un » (Jn 17, 21). Que de personnes font preuve chaque jour de patience et insufflent l’espérance, en veillant à ne pas créer la panique mais la co-responsabilité! Que de pères, de mères, de grands-pères et de grands-mères, que d’enseignants montrent à nos enfants, par des gestes simples et quotidiens, comment affronter et traverser une crise en réadaptant les habitudes, en levant les regards et en stimulant la prière! Que de personnes prient, offrent et intercèdent pour le bien de tous.La prière et le service discret: ce sont nos armes gagnantes! 
«Pourquoi avez-vous peur? N’avez-vous pas encore la foi? ». Le début de la foi, c’est de savoir qu’on a besoin de salut. Nous ne sommes pas autosuffisants; seuls, nous faisons naufrage: nous avons besoin du Seigneur, comme les anciens navigateurs, des étoiles. Invitons Jésus dans les barques de nos vies. Confions-lui nos peurs, pour qu’il puisse les vaincre. Comme les disciples, nous ferons l’expérience qu’avec lui à bord, on ne fait pas naufrage. Car voici la force de Dieu: orienter vers le bien tout ce qui nous arrive, même les choses tristes. Il apporte la sérénité dans nos tempêtes, car avec Dieu la vie ne meurt jamais. 
Le Seigneur nous interpelle et, au milieu de notre tempête, il nous invite à réveiller puis à activer la solidarité et l’espérance capables de donner stabilité, soutien et sens en ces heures où tout semble faire naufrage. Le Seigneur se réveille pour réveiller et raviver notre foi pascale. Nous avons une ancre: par sa croix, nous avons été sauvés. Nous avons un gouvernail: par sa croix, nous avons été rachetés. Nous avons une espérance: par sa croix, nous avons été rénovés et embrassés afin que rien ni personne ne nous sépare de son amour rédempteur. Dans l’isolement où nous souffrons du manque d’affections et de rencontres, en faisant l’expérience du manque de beaucoup de choses, écoutons une fois encore l’annonce qui nous sauve: il est ressuscité et vit à nos côtés. Le Seigneur nous exhorte de sa croix à retrouver la vie qui nous attend, à regarder vers ceux qui nous sollicitent, à renforcer, reconnaître et stimuler la grâce qui nous habite. N’éteignons pas la flamme qui faiblit (cf. Is 42, 3) qui ne s’altère jamais, et laissons-la rallumer l’espérance. 
Embrasser la croix, c’est trouver le courage d’embrasser toutes les contrariétés du temps présent, en abandonnant un moment notre soif de toute puissance et de possession, pour faire place à la créativité que seul l’Esprit est capable de susciter. C’est trouver le courage d’ouvrir des espaces où tous peuvent se sentir appelés, et permettre de nouvelles formes d’hospitalité et de fraternité ainsi que de solidarité. Par sa croix, nous avons été sauvés pour accueillir l’espérance et permettre que ce soit elle qui renforce et soutienne toutes les mesures et toutes les pistes possibles qui puissent aider à nous préserver et à sauvegarder. Étreindre le Seigneur pour embrasser l’espérance, voilà la force de la foi, qui libère de la peur et donne de l’espérance. 
«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi? » Chers frères et sœurs, de ce lieu, qui raconte la foi, solide comme le roc, de Pierre, je voudrais ce soir vous confier tous au Seigneur, par l’intercession de la Vierge, salut de son peuple, étoile de la mer dans la tempête. Que, de cette colonnade qui embrasse Rome et le monde, descende sur vous, comme une étreinte consolante, la bénédiction de Dieu. 
Seigneur, bénis le monde, donne la santé aux corps et le réconfort aux cœurs.
Tu nous demandes de ne pas avoir peur.
Mais notre foi est faible et nous sommes craintifs.
Mais toi, Seigneur, ne nous laisse pas à la merci de la tempête.
Redis encore : « N’ayez pas peur » (Mt 28, 5).
Et nous, avec Pierre, “nous nous déchargeons sur toi de tous nos soucis, car tu prends soin de nous” (cf. 1P 5, 7).

2277

    Pape François
     (Homélie du 25 mars 2020 - Sainte Marthe - L'Annonciation du Seigneur)
" L’évangéliste Luc ne pouvait savoir cela que par un récit de la Vierge Marie. En écoutant Luc, nous avons écouté la Vierge Marie qui raconte ce mystère. Nous sommes devant le mystère. Le mieux que nous puissions faire maintenant c’est peut-être de relire ce passage, en pensant que c’est la Vierge Marie qui le raconte. 
En ce temps-là,
l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu
dans une ville de Galilée, appelée Nazareth,
à une jeune fille vierge,
accordée en mariage à un homme de la maison de David,
appelé Joseph ;
et le nom de la jeune fille était Marie. 
L’ange entra chez elle et dit :
« Je te salue, Comblée-de-grâce,
le Seigneur est avec toi. »
À cette parole, elle fut toute bouleversée,
et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. 
L’ange lui dit alors :
« Sois sans crainte, Marie,
car tu as trouvé grâce auprès de Dieu.
Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ;
tu lui donneras le nom de Jésus.
Il sera grand,
il sera appelé Fils du Très-Haut ;
le Seigneur Dieu
lui donnera le trône de David son père ;
il régnera pour toujours sur la maison de Jacob,
et son règne n’aura pas de fin. » 
Marie dit à l’ange :
« Comment cela va-t-il se faire,
puisque je ne connais pas d’homme ? » 
L’ange lui répondit :
« L’Esprit Saint viendra sur toi,
et la puissance du Très-Haut
te prendra sous son ombre ;
c’est pourquoi celui qui va naître sera saint,
il sera appelé Fils de Dieu. 
Or voici que, dans sa vieillesse, Élisabeth, ta parente,
a conçu, elle aussi, un fils
et en est à son sixième mois,
alors qu’on l’appelait la femme stérile.
Car rien n’est impossible à Dieu. » 
Marie dit alors :
« Voici la servante du Seigneur ;
que tout m’advienne selon ta parole. »
Alors l’ange la quitta. 
Voilà le Mystère »

L'Annonciation - by Fra-Angelico

2276

    Pape François
     (Homélie du 24 mars 2020 - Sainte Marthe - L'acédie, un brouillard qui empêche de vivre)
La liturgie de ce jour nous fait réfléchir sur l’eau, l’eau comme symbole de salut, parce que c’est un moyen de salut, mais l’eau est aussi un moyen de destruction : pensons au Déluge… Mais dans ces lectures, l’eau est pour le salut. Dans la première lecture, cette eau qui conduit à la vie, qui assainit les eaux de la mer, une eau nouvelle qui assainit. Et dans l’Évangile, la piscine, cette piscine où allaient les malades, pleine d’eau, pour guérir, parce qu’on disait que parfois les eaux bouillonnaient, comme un fleuve, parce qu’un ange descendait du ciel pour les agiter, et le premier, ou les premiers, qui se jetaient dans l’eau étaient guéris. Et beaucoup – comme le dit Jésus – « étaient couchés une foule de malades, aveugles, boiteux et impotents », là, attendant la guérison, que l’eau soit agitée. Cela fait réfléchir, non ? C’est un peu trop… parce que celui qui veut être guéri s’arrange pour avoir quelqu’un qui l’aide, il se lève, il est un peu rapide, et aussi un peu malin… mais celui-ci, là depuis 38 ans, au point qu’on ne sait pas s’il est malade ou s’il est mort… Le voyant couché là, et connaissant la réalité, le fait qu’il était là depuis très longtemps, Jésus lui dit : « Veux-tu guérir ? ». Et la réponse est intéressante : il ne dit pas oui, il se plaint. De la maladie ? Non. Le malade répond : « Seigneur, je n’ai personne pour me plonger dans la piscine quand l’eau est agitée. En effet, pendant que j’y vais – que je prends la décision d’y aller – un autre descend avant moi ». Un homme qui arrive toujours en retard. Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton brancard et marche ». À l’instant, l’homme fut guéri.
L’attitude de cet homme nous fait réfléchir. Était-il malade ? Oui, peut-être, il avait une sorte de paralysie, mais il semble qu’il pouvait marcher un peu. Mais il était malade dans son coeur, il était malade dans son âme, il était malade de pessimisme, il était malade de tristesse, il était malade d’acédie. Voilà la maladie de cette homme : « Oui, je veux vivre, mais… », il était là. Mais la réponse est-elle : « Oui, je veux être guéri ! » ? Non, il se plaint. « Ce sont les autres qui arrivent les premiers, toujours les autres ». La réponse à la demande de Jésus pour le guérir, c’est une plainte contre les autres. Et ainsi, 38 années de plainte contre les autres. Et sans rien faire pour guérir.
C’était un samedi : nous avons entendu ce qu’on fait les docteurs de la loi. Mais la clé, c’est la rencontre avec Jésus, après. Il le trouva dans le Temple et lui dit : « Te voilà guéri. Ne pèche plus, il pourrait t’arriver quelque chose de pire ». Cet homme était dans le péché, mais il n’était pas là parce qu’il avait fait quelque chose de grave, non. Le péché de survivre et de se plaindre de la vie des autres : le péché de la tristesse qui est la semence du diable, de cette incapacité à prendre une décision sur sa vie, mais oui, regarder la vie des autres pour se plaindre. Pas pour les critiquer, pour se plaindre. « Ils y vont avant, je suis la victime de cette vie » : les plaintes, elles respirent la plainte, ces personnes.
Si nous comparons avec l’aveugle-né que nous avons entendu dimanche dernier, l’autre dimanche : avec quelle joie, avec quelle détermination il avait pris la guérison, et aussi avec quelle détermination il est allé discuter avec les docteurs de la Loi ! Il y est simplement allé et il a informé : « Oui, c’est cela ». Point. Sans compromis avec la vie… Cela me fait penser à beaucoup d’entre nous, à beaucoup de chrétiens qui vivent dans cet état d’acédie, incapables de faire quelque chose, mais se plaignant de tout. Et l’acédie est un venin, c’est un brouillard qui enveloppe l’âme et ne l’empêche de vivre. Et c’est aussi une drogue parce que si tu la goûtes souvent, cela te plaît. Et tu finis comme un « dépendant triste », un « dépendant de l’acédie »… C’est comme l’air. Et c’est un péché assez habituel parmi nous : la tristesse, l’acédie, je ne dis pas la mélancolie, mais c’est proche.
Cela nous fera du bien de relire ce chapitre 5 de Jean pour voir comment est cette maladie dans laquelle nous pouvons tomber. L’eau est pour nous sauver. « Mais je ne peux pas me sauver ! – Pourquoi ? – Parce que c’est la faute des autres ». Et je reste là pendant 38 ans… Jésus m’a guéri : on ne voit pas la réaction des autres qui sont guéris, qui prennent leur brancard et qui dansent, chantent, rendent grâce, le disent à tout le monde ? Non, il avance. Les autres lui disent qu’il ne faut pas faire cela, et il dit : « Mais celui qui m’a guéri m’a dit que c’était possible », et il va de l’avant. Et puis, au lieu d’aller trouver Jésus, le remercier et tout, il informe : « C’était comme cela ». Une vie grise, mais grise de ce mauvais esprit qu’est l’acédie, la tristesse, la mélancolie. 
Pensons à l’eau, à cette eau qui est le symbole de notre force, de notre vie, l’eau dont Jésus s’est servi pour nous régénérer, le baptême. Et pensons aussi à nous-mêmes, si l’un de nous risque de glisser dans cette acédie, dans ce péché neutre : le péché du neutre, c’est cela, ni blanc ni noir, on ne sait pas ce que c’est. Et c’est un péché que le diable peut utiliser pour annihiler notre vie spirituelle et même notre vie personnelle.
Que le Seigneur nous aide à comprendre combien ce péché est mauvais et dangereux.
pape François ce 24 mars 2020 - Bénédiction du Saint Sacrement, après la Messe et un temps d'adoration

 

2273

    Pape François 
     (Entretien du 24 mars accordée au quotidien italien La Repubblica - dans un contexte de pandémie due au virus Covid-19)
“Nous devons redécouvrir le caractère concret des petites choses, des petites attentions à avoir envers nos proches, nos parents, nos amis. Et comprendre que dans ces petites choses, il y a notre trésor. Il y a des gestes minimes, qui se perdent parfois dans l'anonymat du quotidien, des gestes de tendresse, d'affection, de compassion, qui sont pourtant décisifs, importants. Par exemple, un plat chaud, une caresse, un câlin, un appel téléphonique... Ce sont des gestes familiers d'attention aux petits détails de chaque jour qui donnent un sens à la vie et qui font qu'il y a communion et communication entre nous.”
«Parfois, nous vivons une communication entre nous qui n'est que virtuelle. Nous devrions plutôt découvrir une nouvelle proximité. Une relation concrète faite d'attention et de patience. Souvent les familles à la maison mangent ensemble dans un grand silence qui cependant n’est pas le fruit d’une écoute réciproque, mais lié au fait que les parents regardent la télévision pendant qu'ils mangent et que leurs enfants sont sur leur téléphone portable. On dirait des moines isolés les uns des autres. Il n'y a là aucune communication. Il est important au contraire de s'écouter les uns les autres parce que nous comprenons les besoins de chacun, leurs besoins, leurs efforts, leurs désirs. Il y a un langage fait de gestes concrets qui doit être sauvegardé. A mon avis, la douleur de ces jours doit s’ouvrir vers ce concret».
«Je remercie ceux qui se dépensent pour les autres. Ils sont un exemple de ce caractère concret. Et je demande que chacun soit proche de ceux qui ont perdu des êtres chers, en essayant de les accompagner de toutes les manières possibles.
La consolation doit maintenant être l'engagement de tous». «Notre comportement influence toujours la vie des autres» «Tous sont enfants de Dieu, et Dieu les regarde. Même ceux qui ne l’ont pas encore rencontré, qui n'ont pas le don de la foi, peuvent trouver là leur chemin, dans les belles choses auxquelles ils croient : ils peuvent trouver la force dans l'amour pour leurs enfants, pour leur famille, pour leurs frères et sœurs. Quelqu’un peut dire : ‘Je ne peux pas prier parce que je ne crois pas’. Mais en même temps, il peut croire en l'amour des gens qui l'entourent et là trouver de l'espérance». 
pape François en prière - 2020

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    pape François
(Audience générale du 1er mai 2013 - portrait de saint  Joseph - mois de mai consacré à la Vierge Marie - importance du travail ; de la solidarité - travail d'esclave - prière en famille - prière du Rosaire/chapelet)
Chers frères et sœurs, bonjour, 
Aujourd’hui, premier mai, nous célébrons saint Joseph travailleur et nous commençons le mois traditionnellement consacré à la Vierge. Ainsi, au cours de notre rencontre, je voudrais m’arrêter sur ces deux figures si importantes dans la vie de Jésus, de l’Église et de notre vie, à travers deux brèves réflexions: la première sur le travail, la deuxième sur la contemplation de Jésus. 
1. Dans l’Évangile de saint Matthieu, à l’un des moments où Jésus revient dans sa patrie, à Nazareth, et parle dans la synagogue, est souligné l’émerveillement des villageois face à sa sagesse, et la question qu’ils se posent : « Celui-là n’est-il pas le fils du charpentier ? » (13, 55). Jésus entre dans notre histoire, il vient parmi nous, en naissant de Marie par l’œuvre de Dieu, mais à travers la présence de saint Joseph, le père légal qui veille sur lui et lui enseigne également son travail. Jésus naît et vit dans une famille, dans la sainte Famille, en apprenant de saint Joseph le métier de charpentier, dans l’atelier de Nazareth, en partageant avec lui l’application, la fatigue, la satisfaction et également les difficultés de chaque jour. 
Cela nous rappelle la dignité et l’importance du travail. Le livre de la Genèse rapporte que Dieu créa l’homme et la femme en leur confiant la tâche d’emplir la terre et de la soumettre, ce qui ne signifie pas l’exploiter, mais la cultiver et la préserver, en prendre soin à travers son travail (cf. Gn 1, 28 ; 2, 15). Le travail fait partie du dessein d’amour de Dieu ; nous sommes appelés à cultiver et à protéger tous les biens de la création et de cette façon, nous participons à l’œuvre de la création ! Le travail est un élément fondamental pour la dignité d’une personne. Le travail, pour utiliser une image, nous « oint » de dignité, nous remplit de dignité; il nous rend semblables à Dieu, qui a travaillé et travaille, qui agit toujours (cf. Jn 5, 17) ; il donne la capacité de gagner sa vie, de faire vivre sa famille, de contribuer à la croissance de sa nation. Et je pense ici aux difficultés que, dans divers pays, rencontre aujourd’hui le monde du travail et de l’entreprise ; je pense à ceux, et pas seulement les jeunes, qui sont au chômage, souvent à cause d’une conception purement économique de la société, qui recherche le profit égoïste, sans tenir compte des paramètres de la justice sociale. 
Je désire adresser à tous l’invitation à la solidarité, et aux responsables des affaires publiques l’encouragement à faire tous les efforts pour donner un nouvel élan à l’emploi ; cela signifie se préoccuper de la dignité de la personne ; mais surtout, je voudrais dire de ne pas perdre l’espérance ; saint Joseph aussi a traversé des moments difficiles, mais il n’a jamais perdu confiance et a su les surmonter, dans la certitude que Dieu ne nous abandonne pas. 
Et je voudrais également m’adresser en particulier à vous, garçons et filles, et à vous, les jeunes : appliquez-vous dans votre devoir quotidien, dans l’étude, dans le travail, dans les relations d’amitié, dans l’aide envers les autres ; votre avenir dépend également de la façon dont vous saurez vivre ces précieuses années de la vie. N’ayez pas peur des engagements, du sacrifice, et ne regardez pas l’avenir avec crainte ; gardez vivante l’espérance : il y a toujours une lumière à l’horizon. 
J’ajoute encore un mot sur une autre situation de travail particulière qui me préoccupe : je veux parler ce que nous pourrions appeler le « travail esclave », le travail qui rend esclave. Combien de personnes, à travers le monde, sont victimes de ce type d’esclavage, où c’est la personne qui est au service du travail, tandis que ce doit être le travail à offrir un service aux personnes pour qu’elles aient une dignité. Je demande aux frères et sœurs dans la foi et à tous les hommes et femmes de bonne volonté un choix ferme contre la traite des personnes, où figure aussi le « travail esclave ». 
2. J’évoque une seconde réflexion : dans le silence de l’action quotidienne, saint Joseph, avec Marie, n’ont qu’un seul centre d’attention : Jésus. Ils accompagnent et protègent, avec application et tendresse, la croissance du Fils de Dieu fait homme pour nous, en réfléchissant sur tout ce qui arrive. Dans les Évangiles, saint Luc souligne à deux reprises l’attitude de Marie, qui est aussi celle de saint Joseph : elle « retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (2, 19.51)
Pour écouter le Seigneur, il faut apprendre à le contempler, à percevoir sa Présence constante dans notre vie ; il faut s’arrêter pour dialoguer avec Lui, lui faire une place avec la prière. Chacun de nous, vous aussi les garçons, les filles, les jeunes, si nombreux ce matin, devrait se demander : quelle place est-ce que je laisse au Seigneur ? Est-ce que je m’arrête pour dialoguer avec Lui ? Depuis que nous étions petits, nos parents nous ont habitués à commencer et à terminer la journée avec une prière, pour nous éduquer à sentir que l’amitié et l’amour de Dieu nous accompagnent. Souvenons-nous davantage du Seigneur pendant nos journées ! 
Et en ce mois de mai, je voudrais rappeler l’importance et la beauté de la prière du saint Rosaire. En récitant le Je vous salue Marie, nous sommes conduits à contempler les mystères de Jésus, et donc à réfléchir sur les moments centraux de sa vie, parce que, comme pour Marie et pour saint Joseph, Il est au centre de nos pensées, de nos attentions et de nos actions. Ce serait une belle chose si, surtout en ce mois de mai, l’on récitait ensemble en famille, avec les amis, dans la paroisse, le saint Rosaire ou quelque prière à Jésus et à la Vierge Marie ! La prière faite ensemble est un moment précieux pour rendre encore plus solide la vie familiale, l’amitié ! Apprenons à prier davantage en famille et comme famille ! 
Chers frères et sœurs, demandons à saint Joseph et à la Vierge Marie qu’ils nous enseignent à être fidèles à nos engagements quotidiens, à vivre notre foi dans les actions de chaque jour et à laisser plus de place au Seigneur dans notre vie, à nous arrêter pour contempler son visage. Merci.

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    pape François
(1er mai 2013 - Décret pour la mention du nom de saint Joseph dans les prières eucharistiques II, III, IV du Missel Romain)
DÉCRET : Placé à la tête de la Famille du Seigneur, saint Joseph de Nazareth a accompli avec générosité la mission reçue de la grâce dans l’économie du salut en tenant lieu de père à Jésus. En adhérant pleinement au mystère salvifique de l’humanité, qui en était à ses débuts, il est devenu un modèle exemplaire de cette généreuse humilité que la foi chrétienne exalte au plus haut point, et un témoin de ces vertus communes, humaines et simples, qui sont nécessaires pour que les hommes deviennent de vertueux et authentiques disciples du Christ. C’est en mettant en œuvre ces mêmes vertus que cet homme juste, qui prit soin de la Mère de Dieu avec amour, et se dédia avec un joyeux dévouement à l’éducation de Jésus Christ, est devenu le gardien des trésors les plus précieux de Dieu le Père, et le soutien du Corps mystique, c’est-à-dire de l’Église, lui que le peuple de Dieu n’a cessé de vénérer tout au long des siècles. 
Dans l’Église catholique, les fidèles ont toujours manifesté d’une manière ininterrompue une grande dévotion envers saint Joseph, honorant solennellement et constamment la mémoire de l’Époux très chaste de la Mère de Dieu et du Patron céleste de toute l’Église, tant et si bien que, durant le très saint Concile Œcuménique Vatican II, le Bienheureux Jean XXIII prit la décision d’ajouter son nom dans le très vénérable Canon Romain. 
Ayant présent à l’esprit la communion des saints, qui nous accompagnent dans le cours du temps comme pèlerins en ce monde pour nous conduire au Christ et nous unir à lui, le Souverain Pontife Benoît XVI a bien voulu accueillir et approuver les vœux très pieux, formulés par écrit, en provenance de multiples lieux, une décision qui a été confirmée récemment par le Souverain Pontife François
Ainsi, au vu de ce qui précède, cette Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, en vertu des facultés concédées par le Souverain Pontife François, décrète très volontiers que le nom de Saint Joseph, Époux de la Vierge Marie, soit désormais ajouté aux Prières eucharistiques II, III et IV de la troisième édition typique du Missel Romain, après le nom de la Bienheureuse Marie toujours Vierge comme suit : 
dans la Prière eucharistique II : « ut cum beáta Dei Genetríce Vírgine María, beáto Ioseph, eius Sponso, beátis Apóstolis » ; dans la Prière eucharistique III : « cum beatíssima Vírgine, Dei Genetríce, María, cum beáto Ioseph, eius Sponso, cum beátis Apóstolis » ; dans la Prière eucharistique IV : « cum beáta Vírgine, Dei Genetríce, María, cum beáto Ioseph, eius Sponso, cum Apóstolis ». (1)
Pour les textes rédigés en langue latine, on doit utiliser dès maintenant ceux qui sont mentionnés ci-dessus et font partie dorénavant à l’édition typique. La Congrégation pourvoira dans l’avenir aux traductions dans les langues modernes occidentales les plus répandues; celles qui seront rédigées dans les autres langues devront être préparées, selon les normes du droit, par la Conférence des Évêques, puis approuvées par le Siège Apostolique, c’est-à-dire par ce Dicastère.
Nonobstant toute chose contraire. 
Du siège de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, le 1er mai 2013, mémoire de saint Joseph, travailleur.
 Antonio Card. Cañizares Llovera Préfet + Arthur Roche Archevêque Secrétaire
(1) Traduction : 
Dans la Prière eucharistique II : « avec la Vierge Marie, la bienheureuse Mère de Dieu, avec saint Joseph, son époux, les Apôtres ... » ; 
Dans la Prière eucharistique III : « auprès de la Verge Marie, la bienheureuse Mère de Dieu, avec saint Joseph, son époux, les Apôtres ... » ; 
Dans la Prière eucharistique IV :
« auprès de la Vierge Marie, la bienheureuse Mère de Dieu, auprès de saint Joseph, son époux, des Apôtres... ».

Jésus disait à ses disciples : "Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai Aimés." (Jn 15, 12)