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Saint Jean de la Croix
(Vive Flamme B 2, 33-36)
« En cette vie nouvelle, celle de l’âme parvenue à la perfection de l’union avec Dieu, toutes les tendances de l’âme et toutes ses facultés avec leurs attraits et de leurs activités qui, de soi, sont activités de mort et privation de vie spirituelle, deviennent divines. (…) Sa mort se change en vie, à savoir sa vie animale en vie spirituelle. (…)
Tous les mouvements, les inclinations et les actions qui trouvaient leur source et leur force dans la vie naturelle de l’âme sont désormais, par cette union, transformés en mouvements divins, morts à leur activité et leur attrait naturels et vivants pour Dieu, car l’âme, en véritable fille de Dieu, est entièrement mue par l’Esprit de Dieu, comme l’enseigne saint Paul : ceux qui sont mus par l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu même (Rm 8, 14).
Il résulte de ce qui vient d’être dit que l’intelligence de l’âme est intelligence de Dieu, sa volonté est volonté de Dieu, sa mémoire est mémoire de Dieu, sa jouissance est jouissance de Dieu. (…) Ainsi l’âme est morte à tout ce qu’elle était de par sa nature car tout cela était une mort pour elle et elle est vivante à tout ce qu’est Dieu en soi-même. C’est pourquoi, parlant d’elle-même, c’est à bon droit qu’elle dit : ‘en tuant, tu as changé la mort en vie.’ Si bien que l’âme peut dire avec saint Paul : Je vis, non pas moi, mais Christ vit en moi (Ga 2, 20). La mort de cette âme a été changée en vie du Christ et la parole de l’Apôtre : La mort est engloutie dans la victoire (1Co 15, 54), concorde bien avec celle que le prophète Osée met dans la bouche de Dieu : Ô mort, je serai ta mort (Os 13, 14 Vulgate). C’est comme s’il disait : Moi qui suis la vie, je suis une mort pour la mort et la mort sera donc engloutie par la vie. L’âme est donc engloutie dans la vie divine, étrangère à tout ce qui est mondain. (…) En cet état de vie si parfaite l’âme chemine toujours comme en fête, au-dedans comme au-dehors, et la connaissance de son bienheureux sort lui fait très souvent goûter, au palais de son esprit, une grande allégresse divine, comme un cantique nouveau, toujours nouveau, empreint de joie et d’amour. »
Saint Jean de la Croix
(Vive Flamme B 2, 33-36)